L'heure de s'enivrer, Hubert Reeves
L'heure de s'enivrer, Hubert Reeves
Edition : Seuil
Nombre de pages : 236 hors appendices ; 276 pages avec appendices
Résumé
(Présentation de l'éditeur)
" L'univers engendre la complexité. La complexité engendre l'efficacité. Mais l'efficacité n'engendre pas nécessairement le sens. Elle peut conduire aussi au non-sens. Nous (notre génération) sommes les témoins et les acteurs de cette période de l'histoire où ce problème entre sans phase décisive. Si nous avons un rôle à jouer dans l'univers, c'est d'aider la nature à accoucher d'elle-même. L'être le plus menaçant est aussi le seul qui puisse faire réussir l'accouchement.
Ainsi, toutes ces combinaisons fertiles de la matière, cette activité nucléaire des étoiles, ce bourdonnement électromagnétique des nébuleuses, cette exubérance biochimique de l’océan primitif, tout cela n’aurait d’autres sens que de préparer l’holocauste nucléaire ? La conscience n’émergerait-elle ? en quinze milliards d’années ? que pour s’éliminer en quelques minutes ? Nous sommes les témoins et les acteurs de cette période de l’histoire où ces questions deviennent décisives. Si nous avons un rôle à jouer dans l’Univers, c’est d’ aider la nature à accoucher d’elle-même.
L’intelligence n’est pas nécessairement un cadeau empoisonné. L’absurde est encore évitable. L’éveil de la jubilation est, peut-être, l’antidote le plus efficace. "
Commentaire
Hubert Reeves a comme grande qualité sa capacité de vulgarisation. Il parvient à expliquer simplement des sujets compliqués et à illustrer à l'aide d'exemples simples des théories pourtant difficile d'accès.
Mais cet essai n'est pas facile à lire pour autant. Et Reeves s'en rend compte lui-même, puisqu'il nous le présente comme un exercice de ski de fond : la piste verte peut être lue par tous les lecteurs, la piste rouge seulement par ceux qui s'y connaissent un peu en physique (et en astrophysique plus particulièrement). Mais malgré la difficulté que peuvent présenter ces sujets, les théories d'Hubert Reeves sont très intéressantes.
Il nous explique que l'être humain est l'organisme le plus élaboré de la nature, celui qui domine tous les autres. Mais, d'après lui, l'humain est également le plus violent, le seul à être animé d'une pulsion de mort qui le pousse à mettre au point des mécanismes lui permettant de s'auto-détruire (la bombe atomique, par exemple).
Des explications de Reeves, l'on peut surtout retenir ceci : le monde et l'univers qui nous entourent sont le fruit d'un équilibre fragile. C'est cet équilibre qui a permis l'émergence de la vie sur Terre. Et l'homme, de par son comportement, est en train de détruire cet équilibre qui lui a donné la vie. Mieux encore, l'homme adopte des comportements qui sont dangereux pour sa propre survie : il ne se rend pas compte que son utilisation des formidables ressources qui l'entourent dans ce monde pourrait le mener à sa propre extinction.
Car, à force de tirer toutes les ressources possibles et imaginables de la nature, l'homme est en train de la détruire petit à petit...
Sans en avoir l'air, cet ouvrage est donc un formidable plaidoyer pour l'écologie. Hubert Reeves ne fait pas de politique dans son essai : il ne se lance pas dans des discours dignes d'un homme d'état cherchant à récolter les voix de ses électeurs. Ce n'est pas de ce genre d'écologie dont il est question. Non, c'est plutôt à une prise de conscience que nous invite Reeves : il faut se rendre compte que la nature, si elle peut être "utilisée" par nous, doit l'être à bon escient et avec respect.
Je ne prétendrai pas avoir tout compris dans cet ouvrage. La piste rouge, en particulier, m'a parfois posé quelques problèmes de compréhension, malgré la simplification opérée par l'auteur. Mais c'était une lecture intéressante, car elle permet de constater à quel point nos modes de vie sont problématiques. Cet ouvrage fait réfléchir. Et rien que pour ça, je suis contente de l'avoir lu.
Extraits
" La guerre, la souffrance, la mort sont avec nous depuis toujours. "
" Elle [la bombe atomique ] n'est pas un brin plus vicieuse que la réalité, pas un poil plus destructrice que nous. Elle est tout juste le reflet de ce que nous sommes (...). "
" Tout se passe comme si notre espèce était animée d'une pulsion de mort qui la pousse à faire, le plus rapidement et le plus intelligemment possible, les gestes de sa propre destruction. "
" L'humanité prépare fébrilement son propre suicide. "