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Les Livres d'Aline
28 décembre 2019

The Tenant of Wildfell Hall, Anne Brontë

337113

The Tenant of Wildfell Hall

Anne Brontë

Titre français : La recluse de Wildfell Hall

Editions Penguin Classics, 542 pages

petit-coeur

 

Un extrait

"We shouldn’t always have what we want: it spoils the best of us, doesn’t it?"

 

Résumé

Une jeune veuve vient s'installer dans un petit village avec son fils. Les manières de Mrs Graham ne plaisent pas vraiment à ses voisins : très secrète, elle ne se mêle pas aux petites fêtes que les habitants organisent de temps à autre et elle ne participe que peu à la messe du dimanche. Il n'en faut pas plus pour que les plus folles rumeurs se mettent à circuler sur son compte.

D'abord intrigué, puis séduit par son étrange voisine, Gilbert Markham ne croit pas aux commérages qui soutiennent que Mrs Graham est la maîtresse de Frederick Lawrence, le propriétaire de Wildfell Hall. Toutefois, un beau jour, il surprend une conversation entre Mrs Graham et son propriétaire qui lui laisse envisager le pire.

Helen Graham remet alors à Gilbert une partie de son journal : le jeune homme apprend alors une bien triste histoire.

 

Mon avis

ATTENTION : spoilers !

Anne Brontë, la mal-aimée ! Des trois soeurs, elle est sans doute la moins connue, ce qui est assez injuste étant donné que sa plume est aussi belle que celle de ses soeurs. Et les sujets qu'elle traite dans ce roman sont très intéressants et méritent, eux aussi, beaucoup d'attention.

Par le biais d'Helen Graham/Huntingdon, Anne Brontë évoque tout d'abord la cruauté du XIXe siècle envers les femmes indépendantes et intelligentes. Le fait qu'Helen soit presque « obligée » de se marier, car il était impensable de rester « vieille fille » à son époque, semble en effet à la source de bien des malheurs, qui lui auraient probablement été épargnés si elle avait pu rester célibataire et profiter d'une indépendance financière et juridique telle que nous la connaissons aujourd'hui.

Ensuite, la religion chrétienne est très présente, dans ce qu'elle a de plus sombre et cruel. Il y a, tout d'abord, les commérages dont Helen est victime parce qu'elle ne se rend pas à la messe tous les dimanches. Il y a, ensuite, cette vertu chrétienne qui pousse la jeune femme à prendre soin d'un mari agonisant alors que celui-ci l'a humiliée dès les premiers jours de leur mariage. Et enfin, il y a cette même vertu, qui pousse la douce Helen à se transformer en femme inflexible et dure, y compris avec elle-même.

D'autres thèmes qui ont été considérés comme extrêmement choquants à l'époque de la parution du roman sont également développés par l'auteur. Anne Brontë parle d'alcoolisme, d'aventures extra-conjugales, de violences conjugales, de drogue et même de viol conjugal ! Le roman s'est d'ailleurs vendu comme des petits pains à l'époque de sa parution tant cela semblait révolutionnaire d'entrendre parler de telles choses dans une oeuvre de fiction : il était déjà épuisé au bout de six semaines et, en cela, a fait mieux que Jane Eyre et Les Hauts de Hurlevent. Pour traiter de tout cela, Anne se serait en réalité inspirée de la vie de son frère, Branwell Brontë, qui consommait plus que régulièrement du laudanum et de l'alcool.

L'histoire d'Helen débute de la façon la plus classique qui soit : c'est le récit de la vie d'une jeune fille qui, écoutant son coeur plutôt que les sages conseils de sa tante, tombe amoureuse du mauvais prétendant et tient tête à tous afin de pouvoir l'épouser. Dès le départ, on se doute qu'Arthur Huntingdon est un voyou, mais la jolie et naïve Helen est persuadée qu'il a simplement besoin de quelqu'un pour veiller sur lui et le « changer ». Quelques mois après son mariage, la jeune fille se rend compte de son erreur : son mari est volage et a tendance à boire plus que de raison. La voilà coincée dans une prison dorée, pire encore que celle qui l'attendait si elle était restée « vieille fille », puisque les femmes de l'époque dépendaient de leur mari pour tout, y compris pour l'éducation de leurs enfants, qui étaient la « propriété » du mari (le pater familias) et n'avaient rien à voir avec leur mère (aveu personnel au passage : je suis heureuse d'être née à la fin du XXe siècle).

Mais Helen est assez moderne pour son époque, et décidée à préserver la vertu de son jeune garçon, qu'elle veut soustraire à l'influence néfaste de son père, elle fuit le domicile conjugal et trouve refuge à Wildfell Hall, la demeure de son frère, qu'elle occupe sous un nom d'emprunt. La jeune femme prétend être veuve, en espérant ne pas susciter la curiosité des habitants du village et ne pas être retrouvée par son mari. Elle souhaite vivre de sa peinture et amasser suffisamment d'argent pour partir en Amérique avec son fils et sa femme de chambre, Rachel.

Helen n'est donc pas seulement une femme très chrétienne : elle est aussi une féministe dans l'âme ! Car, à l'époque durant laquelle se situe l'intrigue le fait, pour une femme, de quitter le domicile conjugal était illégal. Et le fait de refuser de se plier à son devoir conjugal était impensable or, dans une scène mémorable, Helen claque la porte de sa chambre au nez de son mari ivre mort et s'enferme, lui refusant l'accès à sa couche !

Ces rebondissements sont traités dans un récit de type épistolaire : le roman est en fait une longue lettre de Gilbert Markham à son beau-frère, dans laquelle s'insèrent des passages du journal d'Helen. Le récit est donc assez complexe, non seulement du fait de sa forme, mais aussi du fait des sujets traités. Il est toutefois particulièrement passionnant, du fait de cette femme forte qui en est l'héroïne : tout comme Jane Eyre et Catherine Earnshaw, Helen est une femme décidée. Le seul moment où sa personnalité est décevante est ce passage durant lequel elle retourne à Grassdale Manor afin de jouer les infirmières pour un époux qu'elle n'aime plus et qui ne l'a jamais aimée. Sortant de sa discrète retraite alors que Huntingdon aurait été incapable de penser à aller la chercher à Wildfell Hall, Helen se jette en quelque sorte dans la gueule du loup, se mettant à la merci de cet homme vulgaire et sans pitié. C'est un geste dicté par la piété chrétienne d'Helen, qui la pousse à faire son devoir d'épouse charitable, mais que j'ai vraiment eu du mal à comprendre, car peu en phase avec ce que l'auteure avait fait de son personnage jusque là. Certes, Helen est très pieuse et parle beaucoup du paradis et de l'enfer, de ceux qui méritent le premier ou qui risquent le second, mais j'avoue avoir pensé que Huntingdon avait usé sa patience et sa charité et qu'elle ne se laisserait plus abuser par de vaines promesses venant d'un tel homme. Eh bien, non ! Elle court donc à Grassdale et y fait son devoir de maîtresse de maison mais, histoire de ne pas décevoir ses lecteurs, Anne Brontë lui met dans la bouche des paroles assez dures : Helen exige une promesse écrite de la part de son mari indigne, selon laquelle il la laissera partir avec son enfant si elle juge que l'enfant ou elle-même court un danger quelconque... On retrouve donc quand même un semblant de l'héroïne à laquelle on s'est habitué.

 

En bref

Si les digressions religieuses d'Anne Brontë pourraient décourager certains lecteurs, The Tenant of Wildfell Hall vaut pourtant franchement la peine d'être lu ! C'est un roman intense et très prenant qui, malgré un début tout en douceur, nous plonge bien vite dans des rebondissements passionnants. Pour un roman classique, les thèmes traités sont très modernes et résonnent encore avec beaucoup de force plus de 150 ans après sa parution.

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Commentaires
M
J'ai lu et aimé, sans être un coup de coeur. Un voyage au coeur de cette époque, des paysages et des moeurs qui n'étaient pas tout à fait partagés. J'ai gardé dans ma bibliothèque 'Agnes Grey' dont j'avais préféré. :)
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S
anne brontë était le plus religieuse de la famille, j'irais même jusqu'à dire un peu bigote - <br /> <br /> dire que je n'ai encore lu aucun de ses romans, qui pourtant figurent dans ma pal ;)
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